Par Leo Ryan, rédacteur en chef
Les opérations ont commencé à revenir progressivement à la normale aujourd’hui au port de Montréal, après que le Sénat a suivi tard vendredi l’exemple de la Chambre des communes en adoptant une loi obligeant quelque 1 150 débardeurs en grève à retourner au travail.
Le deuxième plus grand port du Canada est devenu très congestionné en raison de la grève d’une semaine et du récent refus des débardeurs de faire des heures supplémentaires et les fins de semaine en réponse à la décision de l’Association des employeurs maritimes (AEM) de prolonger les quarts de travail et de modifier les modalités de revenu garanti.
Dans un communiqué, l’Administration portuaire de Montréal (APM) a déclaré qu’il y avait près de 20 000 conteneurs actuellement inactifs sur le territoire portuaire et environ 10 navires en attente dans divers secteurs du fleuve Saint-Laurent pour faire escale au port.
Il s’agissait notamment de trois porte-conteneurs Hapag-Lloyd, l’Ottawa Express, le Montreal Express et le Genoa Express, qui avaient été ancrés au poste de pilotage des Escoumins, à quelque 260 milles marins de Montréal.
La reprise des opérations et le retour à une circulation fluide des marchandises nécessiteront plusieurs jours de travail de la part des travailleurs portuaires et des acteurs de la chaîne d’approvisionnement, a indiqué l’APM. Pour cette raison, les clients qui attendent d’importer ou d’exporter des marchandises peuvent s’attendre à des retards dans les semaines à venir.
« Cette nouvelle étape charnière permet au Port de Montréal de retrouver la stabilité et la pleine capacité de remplir son rôle stratégique de service public, et ce, sans interruption à long terme, un rôle particulièrement important alors que nous sommes encore en pleine pandémie », a déclaré Martin Imbleau, président-directeur général de l’APM. « Notre priorité est maintenant de planifier la reprise des activités portuaires et d’assurer un service efficace et fluide aux importateurs et exportateurs d’ici, ainsi qu’à notre client ultime, la population, dans les meilleurs délais possible. »
En moyenne, 275 millions de dollars de marchandises transitent quotidiennement par les quais du port de Montréal, allant des produits agroalimentaires, des produits pharmaceutiques et de l’équipement de construction aux produits phares exportés par les entreprises locales.
La récente grève partielle et les épisodes de grève générale illimités ont gravement affecté la manutention des marchandises dans les secteurs des conteneurs et du vrac sec. Depuis quelques jours, des équipes de l’AEM, des opérateurs de terminaux et des partenaires intermodaux du rail et du camionnage se préparent à la reprise des activités portuaires.
Le projet de loi C-29, soumis à la hâte au Parlement canadien, a été demandé de toute urgence par les milieux d’affaires partout au Canada et par les gouvernements du Québec et de l’Ontario, car les preuves montrent que l’AEM et le syndicat SCFP 375 sont restés très éloignés dans des négociations prolongées pour remplacer une convention collective qui a expiré en décembre 2018.
Le syndicat a déposé une plainte auprès de l’Organisation internationale du travail au motif que la législation enfreint le droit de grève des travailleurs.
En comparaissant devant le Sénat, Michel Murray, porte-parole en chef du SCFP 375, a demandé qu’un paragraphe soit ajouté au projet de loi. «Pour protéger les hommes et les femmes que nous représentons, il faut ajouter à l’article 6 que les conditions et pratiques de travail en vigueur en termes d’horaires de travail qui prévalaient au Port de Montréal jusqu’au 9 avril (avant que l’employeur ne les modifie, continuent de s’appliquer.»
Le président de l’AEM, Martin Tessier, s’est opposé à un tel amendement, soulignant que la convention collective le permet.
«Il est vrai que ce n’est pas un horaire que nous utilisons beaucoup», a déclaré M. Tessier, ajoutant: «Sur ce point, je suis d’accord avec M. Murray, mais nous sommes dans une situation exceptionnelle. Nous sommes dans une pandémie.»
Dans un tel contexte, a-t-il dit, il fallait «plus de flexibilité opérationnelle».
En vertu de la loi, à compter de 0 h 1 aujourd’hui (samedi), le syndicat et les employeurs sont passibles d’amendes de 100 000 $ par jour en cas de non-conformité.
Le projet de loi prévoit également la nomination d’un médiateur-arbitre pour déterminer le contenu d’une nouvelle convention collective contraignante. (photo APM)