Par Leo Ryan, rédacteur en chef
Le port de Québec (APQ) a contesté certains enjeux majeurs soulevés la semaine dernière dans un rapport d’agence fédérale qui concluait que le projet de terminal à conteneurs Laurentia dans sa forme actuelle «est susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants». Dans son projet de rapport, l’Agence d’évaluation d’impact du Canada (AEIC) a affirmé que les diverses mesures d’atténuation proposées par les promoteurs du projet pour minimiser les effets résiduels négatifs et autres sont insuffisantes.
Les commentaires du public sur le projet peuvent être reçus jusqu’au 16 décembre. Le rapport final sera ensuite soumis au ministre de l’Environnement et du Changement climatique. Et le verdict officiel du gouvernement fédéral est attendu au cours du premier trimestre de 2021.
Le projet implique un investissement conjoint de 775 millions de dollars par Hutchison Ports, le CN et le Port de Québec pour construire ce qui est présenté comme le terminal à conteneurs en eau profonde le plus vert d’Amérique du Nord – ouvrant un nouveau corridor maritime entre l’Asie du Sud-Est et le port de Québec à partir de 2024 .
Dans ses commentaires, l’agence a évoqué «d’importants effets environnementaux négatifs résiduels directs et cumulatifs sur le poisson et son habitat, même avec l’application de mesures d’atténuation, de surveillance, de compensation et de suivi».
Il a souligné «des effets environnementaux résiduels directs et cumulatifs importants sur la qualité de l’air et la santé humaine en raison de l’augmentation des émissions de particules et de contaminants provenant de la combustion de combustibles fossiles pendant les phases de construction et d’exploitation du terminal dans un environnement auparavant saturé de contaminants atmosphériques.»
Le rapport intermédiaire a mis en évidence les effets environnementaux négatifs sur l’utilisation actuelle des terres et des ressources à des fins traditionnelles, en particulier les activités de pêche ainsi que les pêches sportives et commerciales.
En réponse au rapport de l’AIEC, Mario Girard, président et chef de la direction de l’Administration portuaire de Québec, a déclaré: «Malheureusement, le rapport provisoire de l’ AIEC ignore les faits importants sur le poisson et son habitat et présente une lecture inexacte et trompeuse des problèmes et des données sur la qualité de l’air. De plus, le rapport ne prend pas en considération une grande partie des informations que nous avons soumises pour donner une image plus complète de l’impact potentiel du projet. C’est très malheureux. Nous espérons que les prochaines étapes du processus d’évaluation actuel aideront à corriger cette situation. »
Entre autres points soulevés, le Port de Québec a indiqué qu’avec l’aide d’experts, l’APQ a acquis une connaissance considérable du poisson et de son habitat au cours des sept dernières années. Des études rigoureuses intégrant une surveillance télémétrique ont fourni des informations sur le comportement et les habitudes des populations de poissons.
D’après ces analyses, on sait maintenant que l’esturgeon jaune et l’esturgeon noir se trouvent dans l’estuaire de la rivière Saint-Charles et non dans la région de la baie de Beauport.
«L’APQ s’étonne également que l’Agence ne tienne pas compte du fait que le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) a statué en 2019 que le bar rayé réintroduit dans le Saint-Laurent au début des années 2000 ne pouvait être considéré la même espèce que celle qui a disparu auparavant. Et que le statut du bar rayé actuellement présent dans le fleuve Saint-Laurent, qui est passé de «en voie de disparition» en 2012 à «disparu» en 2004, devait donc être revu.
«De plus, des analyses télémétriques menées sur 4 ans ont déterminé que la zone de frai du bar rayé était beaucoup plus grande que ce qui avait été initialement estimé, couvrant 280 hectares. Ainsi, le nouveau terminal aura un impact limité sur l’élevage global du bar rayé. »
Le port affirme en outre que «Laurentia aura un impact limité sur le trafic de camions, qui devrait augmenter de 7% sur le boulevard Henri-Bourassa une fois le terminal pleinement opérationnel vers 2035. Afin d’éliminer cet impact, L’APQ préconise depuis janvier 2020 l’utilisation d’une voie de contournement volontaire sur le réseau routier, et demande aujourd’hui à la Ville de Québec et au ministère des Transports de rendre cette voie obligatoire pour tous les camions.
Une fois le terminal à plein rendement en 2035, environ 90% des 700 000 conteneurs qui y transitent seront transportés par train – le modèle économique principal. «À l’exception du terminal Prince Rupert dans l’ouest du Canada, beaucoup moins de camions seront utilisés à Laurentia pour transporter des marchandises conteneurisées que dans les autres terminaux nord-américains.
Entre autres commentaires, le Port de Québec a noté que depuis 2015, il a introduit plusieurs changements aux plans initiaux en réponse aux préoccupations du public et de divers groupes. Cela a entraîné la suppression de 24 hectares du projet, soit 53% par rapport au plan initial.
Enfin, le port a souligné «des avantages à long terme qui en font bien plus qu’un simple terminal à conteneurs» – un pôle logistique sur la Rive-Sud, un tremplin pour des centaines d’entreprises de la région qui importent et exportent et un catalyseur pour les institutions de recherche québécoises et les entreprises innovantes. (La photo est un rendu d’artiste du port de Québec)